Pôle
arts
visuels
Pays
de la Loire

Ce catalogue reprend classiquement la structure des éditions du Musée d’art consacrées aux projets d’art contemporain : un essai, un entretien et des vues d’exposition. Si la pièce lumineuse produite par Angela Bulloch pour le Patio du musée (Firmamental Square, 2022, ciel nocturne reproduisant celui du solstice vu depuis un point situé au-dessus de Nantes) ouvre magistralement cet ouvrage sur une double-page, le catalogue fait la part belle aux sculptures totémiques de l’artiste photographiées de façon isolée par ses galeries. Lumineuses, les images rendent parfaitement compte de la part d’irréalité de ces piles de dodécaèdres en Corian, MDF ou en acier qui sont autant de modélisations des architectures et des paysages urbains qui nous environnent. Seules les vues d’exposition, particulièrement sombres, nous font comprendre que cette « forêt de colonnes » (selon l’artiste) a une réalité matérielle. C’est à la théoricienne Maria Gertrudis, « Mieke », Bal, professeur émérite de théorie littéraire à l’université d’Amsterdam, qu’a été confié l’essai du catalogue. L’article de 6 pages commence par un aveu d’échec : l’impossibilité de définir le travail d’Angela Bulloch. Aussi l’autrice accumule-t-elle davantage les questions que les réponses, accordant beaucoup d’importance à ce qu’elle voit, ce qu’elle ressent et ce qu’elle imagine des œuvres, avant d’interpréter le travail à l’aune de concepts propres à la philosophie : l’effet perlocutoire, ou performatif d’un énoncé, et plus encore l’« inter-passivité » (Zabet Patterson, puis Robert L. Caserio), qui s’oppose à l’interactivité à laquelle l’artiste a trop souvent été rattachée. L’entretien avec l’artiste, mené par la commissaire, Katell Jaffrès, revient quant à lui sur les points de départ du projet d’exposition, le choix du titre, les intentions et les processus de création numérique auxquels l’artiste a recours. Si Angela Bulloch, fort pragmatique, prend soin de détailler concrètement les éléments qui composent l’installation, c’est pour mieux laisser le visiteur échafauder ses propres interprétations… « Nous ne savons pas ce que nous ne savons pas », tel est le nom du faisceau lumineux qui disparaît à son approche, et le titre qu’Angela Bulloch a choisi de donner à cette étrange conversation.

Ilan Michel