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Poétiques de la lutte

Matière vive - Exposition

14.06.2025 — 19.06.2025

Poétiques de la lutte — Pôle Arts Visuels Pays de la Loire

Le 13 juin prochain, à 18h, le Pôle arts visuels vous convie au vernissage de l’exposition collective Poétiques de la lutte qui se tiendra au Grand Huit – Bonus, à Nantes.

Cette exposition, commissariée par Sandra Doublet, réunit les œuvres des 15 artistes lauréat·es de Matière vive : Sophie Baudry, Blandine Berthelot, Blanche Bonnel, Jérémy Gouellou, Brigitte Guillet, Anne Lebréquer, Adrien Ledoux, Cécilia Obouo, France Parsus, Anna Picco, Alice Suret-Canale, Luce Terrasson, Karine van Ameringen, Daniel Van de Velde, Jingqi Yuan. Elle marque la conclusion d’un parcours d’accompagnement singulier, riche d’expériences humaines et professionnelles.

Tout au long de cette aventure collective, une solidarité forte et un désir de faire corps ont émergé, dans un contexte pourtant fragilisé. L’exposition témoigne de cette énergie partagée : elle nous invite à rester mobilisé·es, à poursuivre l’élan et à résister avec poésie et enthousiasme.

L’exposition sera ouverte tous les jours, du 14 au 19 juin prochains.

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« Hannah Arendt voyait en l’artiste « le dernier individu à demeurer dans la société de masse », suggérant que l’« authenticité » et la singularité s’opposent à la massification, à l’uniformisation des pensées et des êtres. D’aucun·es pensent que les artistes résolvent les conflits, réenchantent le quotidien. Leur pouvoir de communiquer par l’art est considéré comme un pouvoir de subversion, de résilience : l’art active « une conscience » élargie permettant de mieux comprendre le monde dans sa complexité et dans sa diversité. La place de l’art dans la société est pourtant remise en cause, le contexte politique actuel délaisse la création. Comment alors se révolter face à cette disparition ?

Le projet des Poétiques de la lutte déploie un imaginaire commun marquant la fin abrupte de l’aventure Matière vive. Il agit comme un accélérateur d’expériences, précipitant les artistes et l’équipe du Pôle arts visuels dans la création de cette exposition. Poétiques de la lutte n’est pas une clôture ni la trace du projet d’accompagnement Matière vive, elle en est plutôt l’un des fantasmes, l’un des possibles, l’affirmation d’une fragilité. Elle met un point d’honneur à garder le désir comme ligne de mire.

Éloge du risque de l’écrivaine Anne Dufourmantelle est apparu comme le point d’inspiration de cette exposition. L’autrice définit le risque comme un moyen de désarmer la répétition, comme un instant décisif engageant « un temps autre » par une sorte de révolte, loin de l’acte irréfléchi : « L’effet retour du risque […] ce serait à partir de l’avenir un rewind [rembobinage] qui démantèlerait en quelque sorte la réserve de fatalité incluse dans tout passé, ouvrant une possibilité d’être au présent – ce qu’on appelle une ligne de risque » (Anne Dufourmantelle, Éloge du risque, Rivages poche, 2014 p.13.). Cette ligne de risque peut être un nouvel horizon : celui de se rendre disponible à l’inédit, à la curiosité, dans l’hospitalité de ce qui vient. Il faut provoquer une intensité de présence à l’autre et à l’événement. Le risque est un éloge de la volonté, un acte qui nous devance et dont on revient transformé. Rien ne serait plus, tout serait à réinventer, faisons le voeu d’un art situé.

Chaque artiste de l’exposition semble être attaché·e à un chapitre de cet ouvrage, sans même le savoir. À lui de deviner lesquelles de ces lignes résonnent singulièrement avec sa pratique ; l’évidence est apparue au cours de nos échanges. Les chapitres Hantises, Prendre le risque de l’enfance, Révolutions, sont autant de fils tirés vers l’idée de résistance. Chaque œuvre porte en elle ce lien avec le risque :

Un condensé de protestation et d’apparition épiphanique se tient dans le nuage dispersé d’Adrien Ledoux et les miniatures brossées de France Parsus. Une puissante énergie du collectif semble s’extraire du brouillard.

La submersion, lente et inexorable est montrée en différents états : dans l’eau tumultueuse pour Brigitte Guillet, dans le lit asséché de la rivière pour Blanche Bonnel, ou dans la ligne de flottaison d’Alice Suret-Canale.

Une part d’irréductible s’immisce dans les graines disséminées de Jingqi Yuan, dans les paysages numériques de Luce Terrasson et dans la sacralité intemporelle avec Blandine Berthelot.

Karine van Ameringen et Cécilia Obouo ouvrent des espaces flottants emplis de couleurs aux accents intimes. À la dimension d’un empêchement individuel (dans le quotidien trivial, les états d’âmes) est impulsée la créativité, à la difficulté de l’être répond une projection de paysages rassurants et colorés.

Les images du monde flottant, le principe de l’impermanence des choses surgissent dans les suspensions d’Anne Lebréquer et de Daniel van de Velde. Leurs œuvres reposent sur l’idée d’une mobilité, sur le caractère essentiel de ce qui ne dure pas et change sans cesse.

Enfin la part de fiction salvatrice se glisse dans le kakémono de Jérémy Gouellou, le drapé brodé de Sophie Baudry et le dessin grand format aux enfants tumultueux d’Anna Picco. C’est le moment de seuil des personnages qui préfigure l’action, on est au bord de l’événement. De quelles natures sont ces poétiques de la lutte ? Les tactiques créatives utilisent la puissance de l’esthétique, mais aussi la solidarité, le collaboratif, elles agissent pour un changement, en manifestant une opposition par des alternatives sensibles et symboliques.

Le rapport du corps à l’autour et au vivant, à l’intime, mais aussi à la contrainte et à l’autorité apparaissent en filigrane dans l’exposition. Chacun·e sort de soi pour mieux se découvrir, quitte son cocon pour imaginer, créer et construire ensemble.

Comme on danserait pour protester, ou on performerait dans l’espace public, les Poétiques de la lutte sont un contrepoint à la culture de masse. Le pouvoir du sensible, disséminé, dispersé, ténu, à la limite de l’invisible, est une protestation silencieuse. La fiction et le désir permettent de rendre possible ce qui n’est pas, en sublimant les faits, en donnant une forme spectaculaire à ce qui n’est plus ou pas encore.

À l’origine des révoltes, ce sont l’indignation et la souffrance diffuse qui agissent : l’enthousiasme, le pouvoir de mobiliser et de faire exister les choses à l’état tacite peuvent être alors pensés comme vecteurs de résistance. »

Sandra Doublet, commissaire de l’exposition

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Matière vive est un parcours expérimental d’accompagnement des artistes professionnel·les ou en voie de professionnalisation, en Pays de la Loire, sur-mesure, par étapes et à la carte, dans une dimension collective et individuelle s’appuyant sur un programme de compagnonnage pensé avec les professionnel·les de la région.

Informations pratiques

Le Grand Huit — Bonus
36 Mail des Chantiers, 44200 Nantes

Entrée libre
Du 14 au 19 juin 2025
Ouvert tous les jours de 15h à 19h
Vernissage le 13 juin à partir de 18h

Commissariat

Sandra Doublet

Artistes

Sophie, Baudry, Blandine Berthelot, Blanche Bonnel, Jérémy Gouellou, Brigitte Guillet, Anne Lebréquer, Adrien Ledoux, Cécilia Obouo, France Parsus, Anna Picco, Alice Suret-Canale, Luce Terrasson, Karine van Ameringen, Daniel van de Velde, Jingqi Yuan

Partenaires du dispositif

Matière vive est soutenu par la Fondation de France et la Région Pays de la Loire