Quel a été le déclic qui vous a décidé à travailler dans le champ des arts plastiques ?
Ça remonte aux visites du musée des beaux-arts de Nantes tous les dimanches quand j’étais enfant, avec mes parents qui sont d’origine ouvrière, et à une éducation qui nous poussait à aller dehors. Je me souviens des expositions de l’avant-garde russe, Wolfgang Tillmans, Remix… et avoir rencontré Claude Pompidou le jour du vernissage. On est là au bon moment, au bon endroit, mais on ne sait pas pourquoi. Je dois beaucoup à Jacques Hayotte, mon enseignant au lycée de Montaigu spécialisé en arts plastiques. Il nous disait : « si vous êtes là pour dessiner des Mickeys, la porte est là ». L’histoire de l’art ne m’a jamais quitté. J’ai fait les beaux-Arts de Rennes, école dirigée par Jacques Sauvageot, ancien vice-président de l’UNEF et membre du PSU. Les choses se sont scellées à ce moment-là. Ils m’ont donné mon diplôme pour mon engagement ; je suis un garçon convaincu. En 2001 je deviens médiateur à la chapelle des Calvairiennes. Le changement de direction de l’association me confie la programmation à 24 ans. Depuis peu, je suis officiellement directeur artistique.
En 20 ans, quelles sont les choses mises en place dont vous êtes le plus heureux ?
Je suis heureux de tout, fier de mes équipes, de ce que nous avons fait ensemble. Le Kiosque est attentif à la question salariale, de la contractualisation, de la propriété intellectuelle ou du droit à l’image. Malgré le confinement, tous les contrats engagés ont été honorés et les productions réalisées. C’est surtout la transmission qui compte : nous venons d’embaucher un garçon qui était au lycée quand j’étais médiateur. Après 15 ans d’activité, j’ai proposé de lancer un audit qui a souligné la place du design et des arts graphiques au centre d’art et la porosité entre les résidences et les ateliers de pratiques artistiques. Les prochaines résidences, c’est ma collègue médiatrice qui les programmera. Il faut passer le témoin.
Qu’est-ce que le Pôle pourrait apporter ?
Le Pôle prend à bras le corps la question des pratiques artistiques. Il apporte la formation pour que nous soyons au courant de nos droits et de nos devoirs. Ce maillage est un travail de silence.
Et maintenant ?
La Nuit Blanche ouvre le 2 octobre : 30 artistes, 10 de plus qu’habituellement, et 10 000 € supplémentaires. L’urgence liée à l’économie est toujours d’actualité. Cette édition montre qu’on repart, comme une grande fête. On investit la ville de Mayenne, mais aussi l’église de Saint-Fraimbault-de-Prières et les thermes gallo-romains de Jublains – ce sera comme le bleu du fond de la piscine d’Isabelle Adjani.
Un souvenir ?
En 2019, au lendemain de la Nuit Blanche, j’avais dormi 4 heures, je vais faire mes courses au supermarché. À la caisse, j’entends « Merci, c’était chouette ». Un garçon d’une trentaine d’années. Il répète : « C’est vraiment chouette ce que vous faîtes ». Je me suis mis à pleurer. Ce que je fais, c’est pour défendre le bien commun.
Ilan Michel